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La caricature pour défier la censure
Au rayon snacks du supermarché Abu Odeh, une pancarte surmontée du drapeau jordanien et d’un poing levé incite à soutenir les marques locales. « Ça m’encourage à continuer le boycott et à chercher des alternatives. J’y arrive presque à 100 % mais il y a certains produits, notamment pour le soin de la peau, pour lesquels je ne trouve pas. Donc j’achète toujours de la crème Nivea », confie amèrement Lina, avant de passer en caisse. Le succès du boycott dépend des solutions existantes et surtout de leur qualité pour inverser durablement le rapport de force. La clef de survie pour Hussam Ayech : « Les produits locaux gagnent en qualité pour s’adapter à la demande. C’est indispensable pour fidéliser le client et devenir une marque de référence. »
Quoiqu’il y ait une exception : Hosne. Enfant d’une réfugiée de la Naksa (exode de quelque 300 000 Palestiniens après la guerre des Six Jours en 1967), il a grandi dans l’un des camps de Jordanie. Parler de lui, c’est parler de « tout ça ». « Pour moi, le retour de la guerre a tout changé dans ma vie, mais rien dans mon travail », raconte le comédien de 27 ans qui a toujours rit de son enfance et de ses origines. Ironie tragique : « Aujourd’hui, ça marche encore mieux avec l’actualité », dit-il.
Une aubaine pour les entreprises jordaniennes. Floqué sur une bouteille de jus de fruits ou un paquet de gâteaux, le drapeau jordanien est devenu un argument de vente féroce. Fastrin a remplacé la lessive Ariel tandis que Mr. Chips s’est substitué aux paquets Lay’s. Un site internet a même été lancé par la chambre d’industrie jordanienne, Urdoni (jordanien en arabe), qui recense une vaste liste de produits made in Jordan. Lancée en janvier 2024, Urdoni « permet au consommateur d’identifier les produits jordaniens dans tous les secteurs et les différents gouvernorats du Royaume », assure de son côté la chambre d’industrie. Le gouvernement surfe sur le phénomène pour promouvoir ce qui ressemble de plus en plus à du patriotisme économique.
En Jordanie, l’histoire est partout. « Chaque période de l’humanité a laissé sa trace, depuis la préhistoire », s’enorgueillit le Département des Antiquités (DoA), qui accorde chaque permis de fouilles dans le pays.
Dans le nuage de fumée ambiant, les humoristes défilent les uns devant les autres. Ça ne vole pas bien haut. « Avant, j’avais des abdos. Maintenant, j’ai une bouée à la place, c’est plus pratique » ; des histoires de chiens hystériques ; gros succès pour l’autodérision de Mohammed, non-voyant : « La seule chose que j’aime c’est l’amour car il rend aveugle. » On rit fort pour soutenir les copains et oublier les chaises vides. Mais pas un mot sur Gaza. « Les gens viennent ici pour déconnecter pendant une heure et ne rien faire d’autre que rire. On ne veut pas parler uniquement de la Palestine, on n'est pas là pour être des activistes politiques », justifie le patron des lieux. Loin donc de Bassem Youssef et de l’humour qui dénonce.
Dans l’ouest de la capitale, en bordure de rocade, le gérant du supermarché Abu Odeh a lui aussi senti les conséquences du boycott. Dans les rayons, les produits stars occidentaux sont devenus des fardeaux car indésirables. « La vente de Pepsi a chuté de 90 % depuis le 7 Octobre », assure Muhammad Behzad, gérant du magasin. Les consommateurs se sont emparés de nouveaux outils numériques pour se repérer dans la jungle marketing. Échange entre amis sur des boucles Whatsapp, sites internet qui répertorient les enseignes à boycotter, applications permettant de tout savoir de l’engagement d’une marque en scannant le code-barre : la société jordanienne s’est organisée. « Le mouvement a conduit à une meilleure sensibilisation des consommateurs. Ils se sont rendu compte que beaucoup de produits jordaniens existaient déjà. Cela les a aussi conduit à davantage se préoccuper de l’origine des produits », analyse l’économiste Hussam Ayech.
Icône sportive dans le monde arabe, la taekwondoïste participera aux Jeux de Paris 2024. Actuellement numéro deux mondiale dans la catégorie des moins de 67 kg, elle est une des principales rivales de la Française Magda Wiet-Hénin.
Chez les humoristes locaux, le retour de la guerre a clairsemé l’auditoire. Trois jours après la salle comble de Mo Amer, la soirée « seuls en scène » prévue par l’unique Comedy Club de Jordanie a pris des allures de « seuls en salle ». Avec une quinzaine de comédiens dans la petite pièce d’un café théâtre. Et deux, trois spectateurs habitués tout au plus. Depuis 2019, le club organise des ateliers et des scènes ouvertes pour « former le futur de l’humour » et « faire oublier le cliché des sourcils froncés des Jordaniens qui ne rient pas », dixit Yazan Ab Al Rous, cofondateur du Amman Comedy Club. Et la formule est un succès selon lui : « Une véritable cohésion s’est créée entre les stand-uppers. » Un peu moins avec le public ce soir-là.