Le module est validé, il peut être inséré dans un article pour être consulté par les internautes.
© William Jean
Carol Burel, William Jean et Eva Lelièvre
Mais après son divorce, elle s’est retrouvée seule et a décidé de s’inscrire aux cours du CSC. "J’apprends surtout pour comprendre tout ce qui est administratif. Ce qu’on me dit à la préfecture, les rendez-vous à la banque…" Coupée de sa famille restée au Xinjiang, où réside encore son fils, elle tisse grâce à ses cours des liens avec des habitants de son quartier. "Je suis allée au CSC pour trouver de l’aide. C’est devenu ma famille", livre-t-elle. Le centre lui a conseillé de participer au jardin partagé.
Les joues un peu rouges, Maimaite, les mains gantées, bêche une petite parcelle de terre où elle travaille. Malgré son arthrose, cette Ouïghoure de 60 ans s’occupe d’un jardin partagé, quai de Traenheim, avec cinq autres femmes françaises du quartier. Elle profite ce jour-là de la présence de son fils, qui a grandi en France et parle parfaitement la langue. Dans ce jardin, elle travaille tout en exerçant son français un peu maladroit. "J’apprends le vocabulaire de l’horticulture. Je ne connais pas beaucoup de légumes d’ici", précise Maimaite. Elle est arrivée en France avec son mari et son fils cadet, il y a treize ans. Son mari chargé des démarches et de la communication, elle n'a au départ pas considéré le français comme essentiel.
Quoussai : "J'en ai besoin dans chaque petit détail de la vie"
Pressé de progresser, il déplore les difficultés d’accès à un enseignement de qualité : "La demande est très grande mais peu d’offres existent. J’ai besoin du français dans chaque petit détail de la vie." À plus long terme, il espère devenir un "membre actif dans la société". Pour le moment, l’anglais lui permet de se faire comprendre par les commerçants strasbourgeois habitués aux touristes. Le vrai problème pour lui, c’est la communication avec les administrations et organismes publics, où le français est indispensable. "J’ai beau préparer deux trois phrases, ça sonne toujours faux", regrette-t-il. Un interprète lui est souvent nécessaire.
Une mosquée en évolution
Le vendredi à l’heure de la grande prière, la place d’Ostwald habituellement passante, réunit près de 1000 hommes, dont beaucoup vêtus de djellaba. Une fréquentation importante qui oblige le lieu à organiser deux temps de prière pour que tout le monde puisse rentrer. Actuellement en travaux, le futur lieu de culte accueillera toutes les activités hébergées au 3 quai du Murhof, mais également une grande salle de prière pour les femmes ainsi que des logements étudiants. À travers toutes ces initiatives, Safir Boustil voit la possibilité de rendre à "la mosquée son sens littéral en arabe 'masjid' c’est-à-dire 'le lieu où l’on se rassemble'".
Ce vendredi, Qoussai "est plus fatigué que d’habitude", remarque son enseignante de français Hasna Belaïdi. Il a du mal avec la conjugaison des verbes du premier groupe. À plusieurs reprises, il prononce le "ent" muet de la fin des verbes. La professeure du centre socioculturel de la Montagne-Verte le fait répéter encore et encore. Originaire de Syrie, Qoussai a travaillé pour l’ONG Syrian for Truth and Justice (STJ) et a rédigé des rapports sur les droits de l’Homme. En 2018, il a fui en Turquie où il a poursuivi son activité. Mais les menaces de mort et les pressions sur sa famille restée en Syrie n’ont pas cessé. Il a adressé une demande d’asile politique à l’ambassade de France et a obtenu sa carte de résident permanent durant l’été 2024. Qoussai prend des cours de français depuis quelques semaines.
Gaïa Herbelin et Zoé Vannarath
Le quai du Murhof entretient des liens avec d’autres structures de la Montagne-Verte. Tous les lundis après-midi, un agent de la mairie vient aider les gens à remplir leurs papiers administratifs. Une permanence qui profite au centre : "Il y a toujours quelqu’un qui toque à la porte", explique Safir Boustil. À quelques minutes à pied, en face de la nouvelle mosquée, l’association organise annuellement au mois de juin une kermesse qui rassemble tout le quartier sur la place d’Ostwald. À ce moment, se mélangent stand de merguez, glaces, concert et structures gonflables où jouent des jeunes enfants, traînent des groupes d’adolescents et discutent des parents.