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Ce qui ne pourra se faire sans laisser la nappe phréatique se recharger, et donc, mettre fin au surpompage. Impensable aujourd’hui, tant que la capitale dépend encore d’Azraq pour un quart de son alimentation en eau et qu’aucune alternative n’est envisagée pour l’agriculture. Conscient du sursis de la réserve, Tamir Akili compte notamment sur une solution : une usine de dessalement de l’eau à Azraq, pour laquelle la RSCN tente de trouver des fonds. « Le ministère de l’Eau affirme pouvoir nous fournir plus de 2,5 millions de m3 d’eau par an, si nous trouvons un moyen de la traiter, parce qu’elle est de mauvaise qualité », expose-t-il avec espoir. L’eau potable actuellement utilisée pour l’oasis serait donc restituée pour d’autres usages, ce qui soulagerait la nappe.
Lisa Delagneau
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Pour attirer plus d’oiseaux, qui ne viennent se reposer qu’à condition d’avoir suffisamment d’eau à disposition, il faudrait réhabiliter une plus large surface de l’oasis. Mais pour Omar Shoshan, l’alimentation artificielle n’est pas une solution viable, alors qu’environ 60 000 personnes vivent dans la région. « Ce n’est pas éthique d’utiliser de l’eau potable pour remplir l’oasis. Il faut retrouver une auto-alimentation naturelle des bassins », clame-t-il.
Ces réussites ne sont que partielles : sur les 347 000 oiseaux comptés en 1967 dans la réserve, seuls 10 000 restaient en 2023. Les habitants du village adjacent, qui vivaient autrefois des ressources fournies par la zone humide, ne peuvent que se souvenir de l’abondance passée.
« Je pouvais nager au milieu des poissons, pêcher dans les bassins, raconte Omar Shoshan, né à Azraq et ancien responsable de la réserve. Il y avait un lac pour les filles, un pour les nageurs professionnels… Nous connaissions le nom de chaque buffle d’eau et cheval sauvage. Vous ne pouvez même pas imaginer le nombre d’espèces qui vivaient là-bas. »
Sauvé de justesse de l’extinction au début des années 2000, l’Aphanius sirhani, ou killifish d’Azraq, s’épanouit aussi dans les eaux claires de l’oasis. Ce petit poisson rayé « est une espèce endémique d’Azraq, il n’existe qu’ici et est devenu un symbole dans le pays », précise Tamir Akili.
« Ce n’est pas éthique d’utiliser de l’eau potable pour remplir l’oasis »
Un écosystème qui tient à un fil
Si la biodiversité est de retour dans l’oasis, dont 10 % de la surface a été restaurée, cela s’est fait au prix fort. En déambulant sur les passerelles en bois qui sillonnent la zone, d’épais tuyaux en plastique, à peine dissimulés par les herbes, attirent le regard. L’eau qui en coule depuis 1994 est elle aussi pompée depuis la nappe par le ministère de l’Eau et de l’Irrigation. Celui-ci accorde 1,5 à 2,5 millions de m3 d’eau annuels à la réserve, gérée par la Société royale pour la conservation de la nature (RSCN). Mais, surexploitée, la nappe fournit moins de la moitié de la quantité d’eau prévue dans le contrat.
La nappe phréatique sous-jacente, si large qu’elle déborde sur la Syrie et l’Arabie saoudite voisines, a cessé d’abreuver l’oasis en 1993. Au fil des années de pompage intensif pour alimenter les villes d’Amman, d’Irbid, de Zarqa et les fermes d’Azraq, l’immense bassin souterrain n’a cessé de diminuer.
En 1965, quatre millions de m3 d’eau étaient extraits. Aujourd’hui, entre 50 et 60 millions de m3 seraient puisés chaque année, même si les sources sont discordantes : le ministère de l’Eau et de l’Irrigation affirme n’en pomper que 40 millions par an.
La nappe, elle, ne se recharge que de 25 millions de m3 – principalement en Syrie – et souffre du réchauffement climatique. Au premier plan de cette consommation, l’agriculture, responsable de nombreux puits illégaux qui siphonnent toujours plus la nappe et font augmenter la salinité des sols.
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